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Dans son sommeil, Undonielle entendait toujours cette voix si effrayante qui lui rappelait son statut d’esclave. Elle se débattait dans des songes aux multiples visages, ou des créatures immenses ou d’aspect repoussant la prenaient en chasse.

 

Elle s’éveilla enfin, tremblante et couverte de sueur. Elle se trouvait dans un lit confortable, sous une grosse couverture de peau, et au fond de la chambre crépitait un feu dans une cheminée. La chaleur était douce. Elle devait avoir fait de la fièvre, car auprès d’elle, posée sur une table de chevet, se trouvait un bassin remplit d’eau et un tissu.

Quelqu’un l’avait donc veillée? Mais où était cette personne? Et où était elle elle-même?

 

Elle se leva et constata que sa cuisse et ses pieds avaient été bandés avec soin. Il n’y avait aucune trace de Loone ni du voleur rencontré dans la forêt.

 

Elle s’approcha de la fenêtre dont le bord extérieur était couvert de neige, et ouvrit les battants. L’air froid du matin s’engouffra dans la chambre, faisant virevolter ses cheveux de jais.

 

Sous elle, a plusieurs mètres de profondeur, car la maison semblait logée sur un rehaussement de terrain, elle apercevait les villageois et plusieurs personnages étranges. Il semblait se dérouler sur la place du marché une grande vente de fourrures, qui devait être la ressource principale de ce petit patelin perdu dans les montagnes.

 

Tandis qu’elle se penchait pour mieux voir, une forme apparut devant elle et lui fit pousser un cri de surprise.

 

- Saluuut! Dit il. Waw! Bel organe pour quelqu’un qui prononce son premier mot! Dit il en souriant jusqu’aux oreilles.

 

Accroupi sur le rebord supérieur de la fenêtre, la tête en bas, il ressemblait plus à une chauve-souris qu’à un humain. Mais ce n’était pas cela qui surprenait le plus Undonielle. En effet, bien qu’elle s’en su capable, elle venait de prononcer son premier mot depuis son éveil loin dans la montagne. Ayant essayé plus tôt déjà, elle en avait ressenti une vive douleur, et s’était vite désintéressée du mode de parole des humains.

 

Mais ce jeune homme à l’air taquin l’avait tellement surprise que le son était sorti seul de sa gorge.

 

La porte de la chambre s’ouvrit alors sur un vieillard tout de bleu vêtu et à la longue barbe blanche comme la neige qui le recouvrait. Il tenait à la main un vieux bâton de bois usé.

 

- Que vois-je, jeune Chalicles? Dit le vieillard. On fait peur aux jeunes filles?

 

Sa voix était d’une douceur incroyable. Il semblait avoir beaucoup vécu, et avoir tiré de ses aventures de nombreux enseignements qui le rendaient si sage aujourd’hui.

 

Il poussa un petit rire et s’approcha de la jeune femme qui recula d’un pas.

 

- Je t’avais dit qu’elle n’est pas commode, Alcaster! Lança le jeune homme.

 

- Ne craint rien, Undonielle… Tu es ici chez toi le temps de ton séjour. Il eu encore un sourire et quitta la chambre d’un pas lent.

 

Avant de fermer la porte il ajouta:

 

- Tu ferais mieux de la laisser se reposer, jeune voleur! Elle ne mérite pas de te supporter tout ce temps. Et c’est en riant qu’il descendit les marches des escaliers.

 

Chalicles souffla et ricana. Puis il se tourna à nouveau vers la jeune femme qui n’avait plus bougé depuis que le vieillard l’avait nommée.

 

- Euh… Ca à pas l’air d’aller mieux toi! Tu devrais me remercier, c’est grâce à moi que tu es en vie à l’heure actuelle! Pour sûr, je ne fais jamais rien gratuitement… Alors qu’as tu à me donner pour ce service rendu?

 

Il sortit de sous sa chemise de cuir une pomme qu’il se mit a croquer à pleines dents.

 

Elle se tourna alors vers lui, et, d’une voix hésitante lui demanda:

 

- Comment connaît il mon nom?

 

- Je chais pas… Dit-il la bouche pleine. Je t’ai amenée ici a moitié morte, après que tu te sois évanouie. Alcaster a posé une main sur ton front et t’a appelé Undonielle. Après ça il a demandé à Hana de t’apporter son meilleur gruau et il t’en a donné.

Depuis tu dormais ici, en faisant beaucoup  de fièvre. J’ai dû veiller sur toi durant deux jours! Tu te rends compte?

 

Il n’était visiblement pas décidé à la laisser aller sans récupérer ses deux jours perdus.

 

- Je n’ai rien à t’offrir… J’en suis désolée… Dit elle après un long silence.

 

Chalicles parut réfléchir un instant.

 

- Et ce monstre… Le hector qui t’accompagnait… il a une belle fourrure! Je pourrais en tirer un bon prix!

 

La cupidité se lisait sur son visage et elle sentit la rage monter en elle.

 

- Touche seulement à un poil de Loone et je te jure que tu ne reverras plus la lumière du soleil. Son visage s’était durci, et sa main se crispait comme lorsqu’elle avait lancé un sort sur le bras du voleur.

 

Aussi trouva t’il plus sage de faire profil bas pour le moment.

 

- Ok, pas «Loone»… Mais alors, comment vas-tu me rembourser? C’est que j’ai du travail en retard moi… Le marché annuel a déjà commencé et je n’ai que la moitié de mon stock de fourrures…

 

Il claqua des doigts, comme si une idée géniale lui était venue.

 

- Avec tes pouvoirs, on devrait être capable de trouver un Yeti et de l’abattre! Ainsi, avec seulement une peau, je pourrai récolter autant d’argent qu’avec 10 de hectors!

 

Undonielle était contre cette idée. Elle refusait de tuer un animal, quel qu’il soit. Cependant, pour surveiller ce jeune homme et ainsi éviter la mort d’un être vivant, elle accepta de l’accompagner le lendemain.

 

C’est ainsi qu’ils partirent tôt, emportant avec eux une belle portion de gruau et une gourde de lait de renne.

 

Alcaster s’était montré compréhensif envers la requête du voleur. Il s’était arrangé pour que Undonielle reçoive  une paire de bottes qui l’empêcheraient  de glisser sur les pentes verglacées, ainsi qu’un manteau doublé de fourrure de Jr. Yeti, l’une des fourrures les plus chaudes et les plus chères.

 

Il ne fallut pas longtemps à Chalicles pour découvrir la piste fraîche d’un Yeti. Elle remontait dans la montagne via un sentier caché dans les broussailles. Ils la suivirent des yeux jusqu’à un coude.

 

Se grattant négligemment la nuque, il regarda Undonielle. Son petit singe en profita pour grimper le long de son bras et se poster sur son épaule. Il semblait visiblement ne pas aimer le froid.

 

- Bon alors… Un Yeti, c’est vraiment très dangereux! T’en approche pas, tu es pas faites pour recevoir des coups. Par contre, a distance, tu pourrais faire des merveilles… Dit il dans un demi sourire, son regard doré plongé dans les yeux d’ambre de la jeune femme.

 

Elle maintint son regard jusqu’à ce que Loone apparaisse et se frotte contre sa cuisse. Il ne semblait pas blessé, mais plutôt heureux de retrouver sa compagne. Il huma l’air, levant haut son haut museau. Une étrange lueur parcouru ses yeux. Il attrapa alors le manteau de la Undonielle entre ses crocs et tira, cherchant à l’éloigner de la piste. Elle se laissa faire sur quelques mètres avant d’être appelée par Chalicles.

 

- Où tu vas comme ça? Lui lança t’il. On y est presque, t’en vas pas! Il est vraiment lourd ce hector! Tu veux pas que je m’en occupe?

 

 

Elle se raidit, ses yeux lançant des éclairs.

 

- Et qu’appelles tu t’en occuper? L’égorger? Lui lancer tes étoiles? Un conseil: laisse le en paix ou tu auras affaire à moi!

 

Il eut un sourire.

 

- Tu l’aimes donc tant que ça ton Loone? Allez va! Je vais pas le tuer… Du moins si on arrive à trouver ce Yeti. Avec ton cabot, c’est loin d’être gagné!

 

C’est alors qu’un grondement se fit entendre. Il n’était pas tout proche, mais pas assez loin au goût des trois intéressés. Il y eu encore un grondement, puis un bruit de pas. Lourd, qui semblait tout écraser sur son passage.

 

- On ferait mieux de filer d’ici… Il a dû nous repérer avec nos cris… J’aurais dû être plus attentif!

 

A peine eut il fini sa phrase qu’une énorme masse de fourrure blanche, surmontée d’un autre animal au cuir bleuté, firent leur apparition.

 

- Dam! Lança Chalicles. Un Yeti et Pepe! File te cacher! Celui-là est trop gros pour toi!

 

Il était pour elle hors de question de fuir le danger. Elle ressentait la puissance de l’animal, mais celui qui le montait, le Pepe, semblait bien plus dangereux. Il ne puisait pas sa force dans ses muscles, mais bien parce qu’il utilisait le yeti comme un coursier.

 

Chalicles sauta en avant, lançant plusieurs étoiles à la vitesse du vent, avant de bondir pour éviter les poings du Yeti qu’il utilisait comme des massues. Il fit une roulade sur le coté et relança une volée d’étoiles. Le Yeti semblait perdu, mais son cavalier gardait l’œil fixé sur le voleur, et tirait sur le harnais pour diriger la créature.

 

Undonielle observait sans bouger. Le jeune homme pourrait certainement s’en sortir sans elle, et son instinct lui dictait de fuir. Mais elle ne le pouvait. Elle se sentait forcée de regarder cette scène. D’apprendre les mouvements tant de Chalicles que de son adversaire.

 

Le voleur s’épuisait. Bondir, courir, lancer des shurikens… Tout cela l’affaiblissait, mais il savait que l’ennemi était loin d’être vaincu. C’est alors qu’un éclair aveuglant apparu dans le ciel, et que la foudre tomba droit sur le monstre. Le harnais se brisa, et le Pepe tomba à la renverse, poussant de petits cris plaintifs.

 

Alors qu’il s’enfuyait, laissant derrière lui son coursier égaré, chalicles lui lança un shuriken qui l’atteignit à la nuque. Il tomba, mort.

 

Le voleur s’en approcha en chantonnant et entreprit de dépecer le cadavre avec une petite lame qu’il gardait dans sa botte. Le petit singe réapparut d’un arbre dans lequel il avait grimpé, et suivait de ses grands yeux les mouvements de son maître.

 

- Tu es horrible, Chalicles. Dit elle. Pourquoi l’avoir tué? Ce n’était qu’une pauvre créature apeurée, tout comme ce Yeti, ou comme Loone…

 

Il semblait ne pas l’écouter. Il continuait de chantonner en accomplissant soigneusement sa besogne. N’en pouvant plus, elle ramassa de la neige qu’elle tassa en une boule bien dure, et la lui lança.

 

- Aiiiiiiie! Mais t’es complètement folle! Pitié, pourquoi je suis tombée sur cette dingue? Pourquoi moi? Dit il en regardant le ciel, les larmes aux yeux. Il se frotta le crâne là où une bosse apparaissait.

 

- Estime toi heureux de n’avoir pas plus souffert. Lança t’elle. Tu mérites bien pire châtiment.

 

Il se tourna à nouveau vers elle. Il semblait énervé, bien plus que les fois précédentes.

 

- Déjà c’est de ta faute si on est là! Eclata t’il. Si j’avais été seul, jamais je me serai attaqué à un Yeti! Encore moins aux Yeti et Pepe! De plus, je sais pas d’où tu viens, mais ici, il faut de l’argent pour vivre! Et si toi tu peux te permettre de vivre aux crochets des autres, moi j’ai besoin de ces peaux!

 

Il se radoucit avant d’ajouter:

 

- Mais merci, c’est grâce à toi si j’ai pu trouver de quoi faire ma saison. Un Pepe vaut encore plus cher qu’un Yeti. De plus, Alcaster donne des primes aux chasseurs qui en rapportent. Car ils attaquent les voyageurs qui se rendent à El Nath. Nous avons tué, c’est vrai… Mais dis toi que c’était pour la bonne cause.

 

- La cause des humains… Lâcha t’elle, amère. Je ne fais pas partie de cette race… Du moins, je ne pense pas…

 

- Hahaha! Mais si voyons! Dit il en riant à gorge déployée. Je sais pas ce qui t’est arrivé avant ta venue, mais tu as l’air d’avoir beaucoup souffert… Allez, oublie tout ça et rentrons. Je te l’ai pas dit, mais la chair du Pepe est exquise! Surtout braisée! Je te ferai gouter ça!

 

 

 

Cantisque s’installa sur le trône qui lui était réservé. Ses yeux d’ambre fixaient chaque visage des membres attablés. Il n’avait pas revu certains depuis de nombreuses années, et leur visage avait beaucoup changé. Mais il ressentait toujours en eux un aussi vif pouvoir.

 

Les membres de la Rose n’avaient pas été choisis au hasard. Et il se plaisait a penser qu’avec une armée aussi puissante, il pourrait un jour faire plier le monde. Mais la séance qui se tenait n’était pas portée sur la guerre. Il s’agissait d’écouter les éclaireurs.

 

Ils étaient partout. Arbres, oiseaux, montagnes, ruisseaux… Tous lui obéissaient.

 

Il ferma les yeux un instant, passant négligemment une main dans son bouc, avant de se redresser. Il leva alors son bâton surmonté d’un crâne cornu et le fit claquer sur le sol de pierre.

 

Il n’avait pas besoin d’un tel artifice pour que la discipline s’installe. Tous attendaient les paroles de leur très cher maître. Il fit un geste à la vieille femme assise à sa droite. Celle-ci se leva, faisant bruisser sa robe noire.

 

- Maître, c’est un fait averé mainenant. Undonielle est revenue…

 

- Est elle maitre de ses pouvoir?

 

- Il semblerait qu’elle ne se soit pas encore totalement  éveillée, maître. Toutefois certains de nos éclaireurs sont déjà tombés sous son charme…

 

Il émit un petit rire.

 

- Si les animaux ne peuvent pas lui résister, il n’en est de même pour les sorciers. Son regard se porta alors sur une jeune femme assise en bout de table. Toi, ma 13ième Rose. Tu partiras demain à la recherche d’Undonielle. Quand tu l’auras trouvée, fais en sorte qu’elle vienne jusqu'à moi. Ne divulgue pas ton rang. Je la veux vivante…

 

Elle aquieça d’un signe de tête.

 

- Je ne vous décevrai pas maître. Peu m’importe que ma vie soit en jeu, tant que je puis vous plaire et vous servir.

 

- Et il me plait que tu me serves de telle manière, Rose... Dit il dans un demi soupir. Néanmoins fait attention. Elle est rusée. Et même encore endormie, elle peut se révéler très dangereuse.

 

- Bien maître.

 

 

 

 

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